Shackleton. Le genre d’artistes paradoxaux pour nombre d’entre nous, qui sentons quand certains ont quelque chose à apporter, qu’ils sont mis en valeur par des institutions que nous respectons (certains magasins de disques, journalistes, blogs), entourés d’une aura sensible, sortant des disques sur des labels « qui le font », mais non, même après plusieurs écoutes de leurs productions, en se forçant un peu, qu’on n’arrive toujours pas à écouter. Qu’on n’aime décidément pas. C’est comme ça et il n’y a rien à faire. Jusqu’au jour où…
Jusqu’à ce jour où, sous l’impulsion d’un nouveau disque, le rideau (rouge) tombe, votre inconscient dénoue de façon naturelle les nœuds du mystère, vous possédez désormais une clé (bleue) sans le savoir, qui vous autorise enfin à accéder à la Pièce de la Connaissance.
Si cette description un peu mystique ne vous inspire rien, c’est que vous n’êtes pas en train d’écouter le fantastique album/mix/live qu’a produit l’anglais Sam Shackleton pour Fabric, en lisant cette chronique. En vérité, je ne suis toujours pas capable d’écouter toutes ses précédentes productions : comment les qualifier… de post-dubstep expérimental barré (mais chiant, ou alors peut-être à replacer dans un contexte comme ici). Alors qu’avec ce disque, on rentre dans une dimension absolument magique et envoutante qui nous plonge dans un état de transe intense : une version électronique et blanche de la culture vaudou, combinée à l’énergie hypnotique psycho-corporelle des derviches tourneurs. Car c’est bien de transe dont il s’agit. Ce disque est un voyage transcendantal entre percussions membranophones (congas, bongos, djembés, tablas, darboukas), atmosphères deep et chelous à la Melchior Productions, et extraits de monologues (trafiqués ou non) en anglais.
Nous sommes sur une pirogue, et nous descendons la rivière (Closeness to nature). Autour de nous, les paysages se meuvent. Nous progressons sans nous rendre compte vers des territoires toujours plus mystérieux ; poésies hermétiques, mais accessibles, sans toutefois pouvoir intellectualiser quoique ce soit. Tout arrive comme des flashs psychédéliques. Mais où sommes nous tombés ? Quelle est cette vieille demeure dans laquelle je me trouve maintenant (Internationnal fires) ? Des spectres d’enfants apparaissent autour de moi et virevoltent à toute vitesse. Vite la fuite…. mais par où sortir !
Je descends du ghost-train un instant pour revenir à une description plus rationnelle (si c’est possible).
Ce disque est la chose la plus captivante et excitante que j’ai entendue depuis le dernier album de Monolake (Silence) en 2009. Cela ne ressemble à rien de ce que vous avez pu écouter avant. Shackleton crée un nouveau genre qui n’appartient qu’à lui, totalement mystique et dansant à la fois. Post-techno, post-dubstep, les adjectifs importent peu. Il ouvre une voie totalement inédite à l’exploration de nouvelles étendues électroniques, sans se la jouer intello overrated. C’est ce que je pensais un peu avant avec ses prods sur Perlon et Skull Disco (il faut toujours se méfier d’une certaine hype qui guette). Mais là, force est de constater qu’il réussit un terrible coup de maitre, une œuvre sans frontières, sans limites, complètement lâchée sur nous de façon wild. La puissance des atmosphères bizarres combinées à ces rythmes primitifs/avant-gardistes est incroyable. Difficile de mettre des mots sur tout cela tellement il est improbable de tenter de décrire toutes les sensations ressenties.
Shackleton – Fabric 55 est un très beau cadeau de Noël vénéneux sous forme de passeport musical qui vous emmènera dans des pays étranges et lointains, dont vous n’avez jamais entendu parlé. Si David Lynch avait eu des racines africaines / orientales, c’est certainement le type de musique qu’il aurait pu composer.
L’album de l’année 2010.
bienvenue (enfin) au monde sauvage de shackleton!
(et quelle dommage qu’on sait maintenant l’électro-pop faible de david lynch)
pour ma part je suis les prods de Shackleton depuis pas mal de temps et j’ai toujours trouvé son terrain de jeu particulièrement formidable, intriguant et excitant. mieux vaut tard que jamais, dit-on.
quelle transe chamanique, c’est hypnotique et puissant.
Un trip psylo sans substance
Quel génie
Si c’est dans la même veine que son set de fin novembre pour Electronic Explorations j’adhère !! Sacré atmosphère dark et chamanique !!
Il ne faut pas être dépressif sinon bonjour le flip !!